Publié le lundi 14 mars 2022

Résidence artistique en milieu scolaire
La compagnie Sacorde
en immersion dans un collège

Par Sophie Lucas, stagiaire

Une des missions du Carré Magique est d’aider la création, et pour ce faire, les résidences en milieu scolaire sont un bon moyen d’aider les compagnie, tout en mettant en avant des temps d’éducation artistique et culturelle. Le collège de Lanmeur, qui propose depuis quelques années une classe expérimentale cirque, va ouvrir à la rentrée prochaine une classe en horaires aménagés pour la pratique du cirque. Il était donc intéressant pour les artistes, et enrichissant pour les élèves, de programmer cette résidence dans cet établissement du Finistère.

Lundi 7 mars

A partir du 7 mars 2022, les artistes circassiens Violette Wauters, Camille de Truchis, Diego Ruiz et le musicien Simon Phelep, de la compagnie Sacorde, sont arrivés à Lanmeur pour y passer une semaine. Ils sont venus pour un temps de création autour de leur prochain spectacle K par K qui aborde les questions de migration. Installés dans la salle omnisports de la ville, à quelques pas de l’école primaire publique et du collège des Quatre Vents, la semaine était ponctuée de visites, ateliers et échanges avec les élèves. 
C’est à 13h30, en pleine pause déjeuner que les artistes ont envahi la cour de récréation du collège pour informer tout un chacun de leur présence non loin. Un air de clarinette a arrêté net les balles de ping-pong et les ballons de basket, pour que les élèves prennent le temps d’observer leur environnement. Sous leurs yeux émerveillés, les voltigeuses et le porteur ont démontré quelques figures, tandis que Simon Phelep, transformé en Joueur de Hamelin, faisait déambuler les élèves à travers la cour. Dans le public, on pouvait entendre les commentaires impressionnés, les réflexions ébahies, et il n’en fallait pas plus pour que les adolescents retombent dans l’enfance et l’imagination. Entre deux figures, certains allaient trouver les artistes pour poser des questions, donner leurs avis et déjà l’échange était instauré. Les applaudissements étaient nombreux après cette petite intervention et on peut être sûr que pour le reste de la semaine, les élèves allaient attendre leur temps de travail avec la compagnie.
En milieu d’après-midi, les 19 élèves de la classe CM1-CM2 de l’école publique des Quatre Vents sont entrés dans la salle omnisports. Impressionnés dès leur arrivée, ils se sont assis dans le calme pour observer les artistes au travail. Violette Wauters montait et descendait inlassablement de sa corde lisse, tandis que Camille de Truchis et Diego Ruiz s’entraînaient ensemble à divers portés. Les élèves étaient attentifs, ils posaient des questions, ne lâchaient pas les circassiens des yeux et s’imaginaient déjà tenter d’exécuter de semblables figures. Pendant l’observation concentrée, Mariane Gautier leur présentait le cirque, les différences entre traditionnel et contemporain, le fonctionnement des tournées, du processus de création, ce qui a suscité d’autres interrogations des plus jeunes. Un temps d’échange a pu avoir lieu avec Violette et Diego, durant lequel les élèves se sont intéressés au temps de musculation, la peur de tomber, la douleur des portés ou encore le nombre de spectacles créés par les artistes.

Mardi 8 mars

Plusieurs classes sont succédées durant la matinée et le début d’après-midi. Tous curieux de passer du temps avec les artistes et de les voir au travail, les élèves avaient préparé en amont certaines questions à poser lors de leur venue. Encadrés par des enseignants de français et d’éducation physique et sportive, les 4°C, 6°A et 6°B ont montré leur enthousiasme et leur incrédulité, certains étant étonnés qu’être circassien soit un « vrai métier ».
Suivant leurs camarades de la veille, une seconde classe de CM1-CM2 de l’école publique des Quatre Vents est venue passer la fin de journée avec les artistes de la compagnie Sacorde. Après avoir échangé sur leurs représentations du cirque et appris quelques différences entre le cirque traditionnel et contemporain, ils ont observé de manière attentive un travail de portés que Violette, Camille et Diego réalisaient en trio. C’est en voyant ces exercices qu’ils ont compris que la création d’un spectacle demande beaucoup de répétitions, d’essais et de réflexion pour arriver au résultat final. Impressionnés par Diego qui rattrapait Violette au vol sur ses épaules après une figure sur la corde lisse, les élèves ont pu poser des questions. 
Très intéressés par le travail de Simon à la musique, ils se sont levés pour l’entourer et découvrir son matériel. Il leur a d’abord présenté tous ses instruments, avant de leur expliquer le morceau sur lequel il travaillait ce jour-là. L’idée était de composer une musique stressante, et puisqu’il avait déjà utilisé plusieurs éléments sonores, Simon leur a montré les différentes strates qui composent son morceau. Les enfants, impliqués dans la discussion, lui ont même suggéré d’enregistrer le bruit aigu de la porte du gymnase. Une idée qui reviendra plus tard dans la semaine !

Mercredi 9 mars

Les cinquième qui sont arrivés après la récréation de la matinée étaient pleins d’énergie et de motivation pour l’atelier qui allait se dérouler. Accueillis par Mariane Gautier du Carré Magique, les élèves ont pu avoir une présentation de la compagnie, de la structure qu’est le Carré Magique et par une explication sur le cirque contemporain. Suite à un bref échange avec les artistes, c’est Diego Ruiz qui a mené l’échauffement. D’abord en cercle pour réveiller chaque partie du corps, il veillait attentivement à ce que personne n’aille trop loin dans les mouvements et ne se fasse mal. Travail d’abdos, de gainage, de saut, les élèves marchaient dans l’espace et se mettaient en position lorsque Diego criait un chiffre en espagnol. Ce fut ensuite à Violette et Camille de mener les exercices, pour que cette fois les jeunes sentent leurs appuis sur le sol et pensent à de nouvelles manières de se mouvoir. 
Divisés en deux groupes, ils se sont ensuite essayés à des portés acrobatiques. Tour à tour, les élèves se faisaient élever dans les airs par leurs camarades. D’abord debout, puis allongés, l’exercice de faire confiance aux autres a été plutôt bien réussi puisqu’ils ont été nombreux à se prêter au jeu. Si les trois circassiens étaient là pour les guider et les encadrer, ils se sont petit à petit effacés pour que les élèves réfléchissent et gèrent eux-mêmes les portés. Diego Ruiz s’est lui-même laissé tomber dans les bras d’un des deux groupes, laissant sa sécurité entre leurs mains. Après cet exercice, les deux groupes se sont allongés au sol et après plusieurs tentatives, ont réussi à rouler sur eux-même au même rythme, pour faire glisser l’un d’entre eux le long des corps. Une vague humaine qui faisait rire les plus jeunes.
En parallèle de cet atelier circassien, une classe de troisième était accompagnée par leur professeur de musique pour rencontrer Simon Phelep. Si les conditions n’étaient pas optimales pour écouter attentivement la bande son du spectacle, ils ont tout de même pu découvrir les différentes techniques utilisées par le musicien. Après des airs de clarinette joués en direct et écoutes des différentes pistes en préparation, les élèves ont pu eux-même participer à la prise de son. Se saisissant d’un micro, ils ont enregistré un bruit de porte grinçante pour l’ajouter à l’univers d’une musique se voulant stressante. 
Cette matinée d’interventions s’est achevée par une démonstration de figures des trois artistes circassiens. Camille et Diego exécutant un porté, tandis que Violette a une nouvelle fois ébahi les spectateurs en montant et descendant de sa corde lisse avec une facilité impressionnante. Les élèves, ravis, ont applaudi chaleureusement avant de retourner au collège.

Jeudi 10 mars

Cette journée était exclusivement consacrée à la venue de la costumière. Elle était présente deux jours, afin de faire des premiers essais de costumes, en lien avec les personnages.

Vendredi 11 mars

En cette dernière journée de résidence à Lanmeur, la costumière de la compagnie a rencontré des élèves de 5° pour leur parler de son travail. Accompagnés par leur professeur d’arts plastiques, ils ont pu voir comment se passaient les répétitions en costume et poser leurs questions. L’après-midi a été occupée par la classe cirque du collège. Venus en atelier pendant trois heures, les élèves ont fait un échauffement, puis des figures avec les circassiens. En petits groupes, ils s’essayaient à divers portés, aidés par Violette, Diego et Camille qui passaient entre les groupes pour donner des conseils. C’est même sur leurs épaules que les jeunes sont parfois montés, escaladant les corps pour voir le gymnase avec une nouvelle hauteur. Entre deux prouesses, les chutes étaient nombreuses et accompagnées de rires de la part des élèves. C’est une bonne ambiance qui régnait dans la salle et il était apparent que la semaine se terminait bien, à la fois pour les élèves et pour les artistes. Leur temps ensemble s’est terminé par un échange, dans lequel les élèves se sont surtout intéressés au processus de création. Comment prendre des décisions sur les figures et la narration d’un spectacle, si tout le monde n’est pas d’accord ? C’est une problématique que la Compagnie Sacorde connaît bien et ils ont conseillé aux élèves de prendre du temps pour tester les idées de chacun, de rester ouverts aux propositions et de mélanger les inspirations. Pour finir, Violette Wauters a montré quelques figures à la corde, démonstration qui restera marquée dans l’esprit de tous les collégiens qui auront eu la chance de la voir cette semaine.

De cet échange, les élèves ont pu prendre conscience que tout le monde peut faire du cirque, et qu’ils ont la chance dans leur collège de pouvoir s’y initier. Même s’ils ne sont pas toujours d’accord sur tous les sujets, et notamment les figures circassiennes qu’ils exécutent en cours d’E.P.S, l’entraide est une notion à alimenter et promouvoir. C’est ensemble qu’ils trouveront les meilleures idées pour avancer dans leurs créations. Les artistes de la compagnie ont également insisté sur le fait que les élèves étaient libres de tout enjeu, personne n’attend d’eux un résultat parfait, ils n’ont pas de spectacle à produire et faire tourner ensuite. Ils devraient donc tirer avantage de ces années d’apprentissage pour s’amuser, se découvrir et ne pas avoir peur de tenter de nouvelles expériences.

 


Autres actualités