Ode Maritime

Par la seule force de l’évocation, Lena Paugam fait revivre l’intensité du poème de Pessoa et sa fascination pour le grand large. Une célébration à fleur d’eau.

« Tout mon sang enrage d’être sans ailes ! Tout mon corps se rue en avant ! » Ode impétueuse, gorgée de fougue et de nostalgie : l’appel impérieux du grand large gouverne ce poème de mille vers, composé par Fernando Pessoa sous l’hétéronyme d’Alvaro de Campos, véritable double de l’auteur. Le spectacle s’est d’abord construit au grand air : au petit matin sur le quai de Binic-Étables-sur-Mer où Lena Paugam a cofondé le festival Lynceus dédié au théâtre in situ. La comédienne en a orchestré en 2020 une lecture musicale impromptue, au gré des allers et venues des bateaux. Sur la scène du théâtre, entourée du guitariste Yann Barreau et du batteur Martin Wangermée, elle y rapporte dans l’ivresse et la joie, la clameur de l’océan. L’électro se mêle au fado pour exprimer l’indolence des flots, le regret de la terre quittée qui s’éloigne peu à peu, le ressac hypnotique. En filigrane, s’entend un délicat hommage à la machinerie de théâtre, historiquement inspirée des techniques maritimes. Un voyage immobile de toute beauté, dans lequel déferle l’imaginaire marin.